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26 Şubat 2014 Çarşamba

Esprit mottainai : le dégoût du gâchis

C’est sous l’angle d’esprit mottainai que les Japonais abordent la question du développement durable. Mais que signifie donc cette fameuse conception mottainai que le Japon souhaite à tout prix conserver dans ses traditions et intégrer dans sa vie quotidienne ? Le mottainai est tout simplement le dégoût profond envers le gâchis.

Cet état d’esprit ne concerne pas uniquement le gâchis alimentaire, mais se traduit plus généralement par le respect de « la nature considérée comme sacrée et la gratitude qui doit être témoignée pour les ressources naturelles ». C’est aussi un sentiment de regret face au temps perdu, aux ressources gaspillées et aux compétences mal ou sous-exploitées. Autrement dit, dans un archipel surpeuplé tel que le Japon, le mottainai évoque un sentiment de malaise face aux diverses formes de gaspillage et suggère une meilleure utilisation des ressources naturelles afin de témoigner son respect et sa gratitude au Créateur.

L’esprit mottainai est tellement ancré dans la culture nippone qu’il est présent à tous les niveaux de la vie.

À titre d’exemple, les hommes d’affaires japonais ont tendance à s’habiller en kurubizu, le cool biz anglo-saxon (abréviation de cool business) pour lutter contre le réchauffement climatique. Cette tradition invite les employés à tomber la veste et la cravate et à déboutonner la chemise durant l’été — souvent caniculaire sur l’archipel — afin de limiter l’usage de la climatisation et donc de lutter contre le réchauffement climatique. Les climatiseurs étant moins sollicités, ils consomment de fait moins d’énergie. Le cool biz a été adopté et institutionnalisé par Junichiro Koisumi, le Premier ministre japonais. Cette initiative a donné lieu à une loi qui en a généralisé l’usage et qui a permis de diffuser la tradition mottainai qui était jusque là le fait d’une minorité de Japonais. Depuis 2005, cette mesure a ainsi permis de réduire de 460 000 tonnes les émissions de dioxyde de carbone, soit l’équivalent de ce que rejette un million de foyers japonais en un an.

Selon l’Energy Conservation Center, « un réglage des climatiseurs à 28°C au lieu de 26°C représenterait une économie d’énergie de 17 %. Le cool biz aura ainsi permis aux autorités nippones d‘éviter l‘émission de 1,14 millions de tonnes de CO2 durant l’été 2006. » Une mesure qui mériterait sans doute qu‘on y prête attention en Europe.

L’esprit mottainai touche également le baseball, le sport le plus populaire de l’archipel. La fédération japonaise de baseball a ainsi instauré de nouvelles règles limitant la durée des matches dans le but de réduire la consommation d’énergie. Selon la PBJ (la Ligue professionnelle du baseball du Japon), « une quantité énorme de dioxyde de carbone est émise lors d‘un match de baseball, ce qui a une incidence sur le réchauffement climatique. » Un match fait consommer de l’énergie « pour déplacer les joueurs et spectateurs sur place, assurer l’éclairage et transporter les ordures » jetées dans le stade. Les rotations d’équipes au cours des neuf manches d’une partie sont désormais limitées à 2 minutes et 15 secondes. Le lanceur n’a que 15 secondes pour lancer la balle. La mesure de réduction de la partie de 12 minutes diminuera la consommation d’électricité de 435 kilowatts-heure par match. 864 matches étant joués chaque année sous l’égide de la PBJ, l’économie réalisée est de l’ordre de 376.000 kWh, ce qui correspond à 209 tonnes de dioxyde de carbone en moins dans l’atmosphère.

Hors des sphères du sport et des affaires, dans celle, plus large, du quotidien, un objet de consommation courante est particulière nuisible à notre environnement : le sac en plastique. Rien qu’en France, 7 milliards sont consommés chaque année, soit environ 110 sacs par habitant. Or leur dégradation dans l’environnement nécessite de 100 à 400 ans. 11 millions de tonnes de papier sont par ailleurs consommés chaque année dans l’Hexagone, dont 50 millions de rouleaux de papier cadeaux, souvent non recyclables.

Dans l’esprit du mottainai, on veille alors à remplacer les sacs en plastique par des furoshiki. Mais qu’est-ce donc que le furoshiki ? Il s’agit tout simplement d’une technique japonaise traditionnelle d’emballage en tissu utilisée pour transporter des vêtements, des cadeaux, etc. Par métonymie, le terme désigne également le carré de tissu utilisé. Le furoshiki peut être utilisé plusieurs fois, contrairement aux papiers d’emballage ou aux sacs en plastique. Il sert à emballer des objets de tailles variées, comme des pommes ou des bouteilles, et peut, plus généralement, se prêter aux usages les plus divers : sac à main, cabas, sac à dos, sacoche pour ordinateur portable ou instrument de musique, porte-bouteilles, porte-livres, emballage de bouquets de fleurs ou de plantes en pot, emballage cadeaux, etc.

Le furoshiki est apparu au Japon en 710-794 après J.-C., à l’époque Nara. Il servait alors à garder les objets de valeur, comme ceux du trésor impérial. Bien qu’il ait changé de nom au fil des siècles, son utilisation est restée la même, notamment en temps de guerre où il permettait d’éviter les pillages. Les marchands contribuèrent fortement à la diffusion du furoshiki en l’employant à la fois pour le transport et la présentation de leurs marchandises. Malheureusement le furoshiki est tombé en désuétude au lendemain de la seconde guerre mondiale avec la généralisation des sacs plastiques et du papier d’emballage. C’est seulement depuis une dizaine d’année qu’il a été remis au goût du jour par un ministère de l’Environnement soucieux de lutter contre les effets néfastes de la surconsommation sur l’environnement.

La tradition du pliage du furoshiki est tellement riche qu’il existe plus de cent façons de le nouer ou de le plier, ainsi qu’une grande variété de matières, couleurs et motifs pour le tissu, du traditionnel au moderne. Autre moyen de respecter l’esprit mottainai : le fukusa. Proche par sa nature du furoshiki, c’est un carré de soie traditionnellement utilisé pour le rituel du nettoyage de l’écope et du natsume ou du chaïre (deux types traditionnels de boîte) et pour tenir la bouilloire chaude et son couvercle lors de la cérémonie du thé. Il sert à envelopper les petits articles et à emballer le déjeuner. Il fait par ailleurs office de napperon lors des repas. En conclusion, on peut dire que l’esprit mottainai est un bon moyen de conserver un comportement écologiquement responsable dans une société comme celle du Japon où les produits de la société de consommation se diffusent à une vitesse vertigineuse. La question du développement durable trouve ainsi dans le mottainai une réponse originale, à la fois traditionnelle et ancrée dans la réalité présente.

Si le modèle japonais gagne à être imité, il n’est pas nécessaire d’aller si loin pour trouver des solutions écologiquement responsables et donner une expression en acte à ce sentiment de dégoût pour le gaspillage appelé au Japon mottanai.

La lutte contre toutes les addictions de la culture du gâchis — culture intrinsèque à la société de consommation — commence tout d’abord par une réforme profonde des consciences afin de faire obstacle intellectuellement à tout ce qui constitue l’actuel empire de la matérialité, dont les résultats ne sont pas négligeables.

Il faut aussi redonner à la religion la dimension morale qui est la sienne afin qu’elle puisse recréer au sein de nos sociétés malades un cadre de vie digne, dont les frontières seront délimitées, non pas certes par les lois du marché, mais par celles, fondamentales et éternelles, que Dieu Tout-Puissant a fixées.

Abandonner les lois du marché peut paraître chimérique et improbable, compte tenu de l’orientation capitalistique des institutions qui gouvernent actuellement le monde. Néanmoins, à l’échelle de l’individu responsable, l’espoir subsiste encore et demeure intact dès lors que la disposition au changement reste sincère. La route qu’il faut emprunter pour y parvenir est nette et bien définie, la fermeté de l’homme dans ses convictions et ses actes est nécessaire pour y atteindre.

Lucie De Rocher est chercheuse en Économie à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.

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